« Le piège s’est refermé. L’addition sera salée « , cette petite phrase prononcée par Jacques Mikusinski, maire adjoint chargé des finances résume assez bien la teneur du débat d’orientation budgétaire qui s’est déroulé mercredi soir à la mairie de Ploërmel.
Le dossier de la dette
Cet article est une synthèse pour rendre le sujet plus digeste. Mais pour vous permettre d’avoir plus d’éléments, nous vous proposons de consulter le dossier complet présenté mercredi soir aux élus par Jacques Mikusinski
C’est un exercice obligatoire pour les communes de plus de 3500 habitants. Ce débat permet aux élus d’avoir une vision globale de la situation financière de la ville, mais il ne donne lieu à aucun vote. Il préfigure ce que sera le vote du budget.
C’est toujours un exercice difficile sur le plan journalistique de rendre compte de ces questions budgétaires, très techniques, mais qui pourtant ont une incidence directe sur la vie quotidienne des habitants.
Jacques Mikusinski a donc présenté cette photographie des finances de Ploërmel. Pour tout dire le cliché est plutôt sombre et les élus vont devoir se livrer à un exercice délicat pour diriger une ville qui cumule les problèmes. Et il n’y a guère d’espoir que les choses s’arrangent avant 2018. D’ici là, la marge de manoeuvre sera très étroite.
Car, comme toutes les collectivités locales, Ploërmel va devoir faire face aux baisses des dotations de l’Etat. Mais en plus elle va devoir gérer le problème des « emprunts toxiques » et on va voir que les solutions sont loin d’être évidentes. Jacques Mikusinski a également pointé du doigt une « anomalie » à laquelle s’est trouvée confrontée la nouvelle équipe municipale en prenant ses fonctions. En effet, au 1er janvier 2014, le fonds de roulement de la ville, c’est à dire sa « gagnotte », le « coussin » qui permet de faire face aux différents imprévus était de 47 000 euros. « C’est déraisonnable de terminer une année avec une telle somme. Il faut toujours avoir au minimum 500 000 euros… », souligne Jacques Mikusinski. La nouvelle équipe municipale s’est donc attelée à reconstituer cette gagnotte qui devrait avoisiner les 800 000 euros. La précédente équipe municipale et notamment Béatrice Le Marre, assume ce résultat. « C’était de l’argent qui appartenait aux ploermelais, nous l’avons rendue aux ploermelais… », commente-t-elle. Car si l’équipe de Béatrice Le Marre a puisé dans cette gagnotte, c’était pour éviter d’avoir recours à l’emprunt, expliquent ses représentants qui font valoir les investissements qu’ils ont réalisés pour « rattraper le retard consécutifs à la politique précédente », celle menée par Paul Anselin. Ce dernier n’a pas de mots assez durs pour dénoncer la politique de ceux qui lui ont succédé. « Vous avez ruiné Ploërmel… », résume-t-il. Concernant les « emprunts toxiques » qu’il a contractés, il souligne « qu’à l’époque », c’était intéressant, mais reconnaît qu’il aurait peut-être du se ranger à l’avis du Trésor public qui était hostile à ces prêts à taux variables.
Mais, pour revenir à l’exercice budgétaire, se retrouve aussi avec le « paquet cadeau » des « emprunts toxiques ». Fort heureusement, si on peut dire, ces derniers ne représentent qu’une faible part de l’endettement de la ville. Mais cela va coûter très cher. Pour essayer d’être synthétique, ces emprunts ont été consentis à l’époque avec des taux variables indexés sur le franc suisse. « C’est à partir de 2008 que la dérive c’est accentuée », analyse Jacques Mikusinski. L’équipe de Béatrice Le Marre a en 2012 tenté de « sécuriser » ces emprunts en obtenant des taux modérés de 4 à 6 % et l’équipe de Patrick Le Diffon poursuit cette stratégie en discutant avec l’organisme mis en place par l’Etat pour aider les collectivités à sortir de cette situation. Alors, bien sur, tout le monde peut se dire qu’il suffit de racheter ces emprunts pour les refinancer à des taux plus faibles. Oui, mais voila, ces emprunts comportent des clauses qui prévoient de lourdes pénalités en cas de remboursements anticipés : pour Ploërmel ces pénalités seraient de 3,8 millions d’euros qui s’ajouteraient aux 2,8 millions de capital restant dus… Car, catastrophe les aléas du court du franc Suisse au mois de janvier ont fait passer le taux d’intérêt de 15% au 1er janvier à… 28%.
Méthodiquement, Jacques Mikusinski a passé en revue les trois possibilités qui permettraient de « traiter » la dette : un refinancement auprès de la SFIl (organisme mis en place par l’Etat), un refinancement auprès d’autres organismes bancaires ou une procédure en contentieux contre Dexia, la banque ayant consenti ces prêts. Aucune de ces possibilités n’offrent de solutions intéressantes pour la ville. Pour l’anecdote, mais c’est tout de même inquiétant, le fonds de soutien aux communes mis en place par l’Etat est indexé sur… le franc Suisse.
Il n’y a donc aucune solution miracle, ce qu’illustre assez bien la conclusion de Jacques Mikusinski qui ne veut « blamer personne » : « le piège s’est refermé. L’addition sera salée » et ce souhait: « on ne peut qu’espérer que le gouvernement réagisse afin de ne pas couler les collectivités locales »…
Des économies plutôt que des impôts
Ce tableau étant dressé, la municipalité a néanmoins mis en place une stratégie. « On attend des réponses de l’Etat, il y aura sans doute des accompagnements », commente Patrick Le Diffon qui trace le cadre général de sa politique : « on souhaite ne pas avoir recours à des augmentations d »impôts », affirme-t-il d’abord. La municipalité souhaite maintenir le soutien aux associations locales.
Alors, comment trouver des recettes supplémentaires? En pariant sur la croissance de la ville tant en terme d’habitants que d’entreprises, ce qui améliorerait les rentrées d’argent, mais aussi en serrant la ceinture au moins d’un cran. Ainsi, en 2015, tous les services sont priés de réduire de 5% leurs dépenses. « Il faut faire aussi bien avec moins d’argent. Il faudra faire des économies plutôt que d’augmenter les impôts… », indique le maire.
Ce qu’ils en disent
– Arnaud Le Piouf souligne le résultat positif en fonctionnement en 2014 de l’équipe précédente, les investissements réalisés pour « rattraper le retard » et les erreurs du passé, les négociations bancaires qui ont permis de faire baisser la dette. « J’attends le budget pour voir quelles seront les coupes », dit-il
-Béatrice Le Marre constate que « on nous a fait une photographie de la situation, mais j’aurai aimé avoir des perspectives, un cap » et dénonce les promesses faites pendant la campagne par l’équipe en place « vous avez promis ce qui n’est plus possible… »
-Paul Anselin accuse l’équipe précédente (ndlr: celle de Béatrice Le Marre) d’avoir arrêté les lotissements, dénonce sa stratégie en matière de PLU (plan local d’urbanisme). il suggère une négociation avec les employés pour augmenter le temps de travail et les heures supplémentaires, l’organisation au plus vite de fusions de communes, de relancer le développement économique et la révision du PLU
-Patrick Le Diffon estime que la question des heures supplémentaires est une piste sur le thème « travailler plus pour gagner plus », se déclare favorable « à 100% » aux fusions de communes, mais rappelle que cette faculté n’est pas ouverte aux communes de plus de 10 000 habitants et qu’il faut donc trouver les moyens de contourner cette loi. Quand à la révision du PLU, elle reviendrait à mettre la commune sous la coupe de la loi Alur « le remède sera pire que le mal… », prévient-il.
'Ploermel. Débat budgétaire : "la note sera salée"' a 1 commentaire
12 février 2015 @ 13 h 27 min David CABAS
M.Guyon,
Je trouve dommage une fois de plus que la seule parole sur le débat d’orientation budgétaire soit donné uniquement aux élus. Certes, ils ont la légitimité démocratique. Je pense pour ma part une légitimité volée car il y a eu beaucoup de mensonges pendant la campagne des municipales. Un an après il serait bon de faire un premier point.
Néanmoins, je reviens au sujet des emprunts toxiques, on utilise l’ignorance des citoyens sur les emprunts toxiques pour faire accepter que l’unique option défendue par les élus ( comme avant avec Mme Le Marre) qui est de négocier avec les escrocs.
Face a cette situation inique, je tente d’organiser une réponse en essayant de constituer un collectif citoyen contre les emprunts toxiques et contre les dettes illégitime.
Depuis mars 2011, je tire la sonnette d’alarme sur les emprunts toxiques, pourquoi les journalistes n’ont pas plus travaillé sur ce grave problème ?
Dav